En se garant devant le muret délimitant l’entrée de la petite cour menant à la maison Hyunwoo paniqua légèrement. Une crise simple et soudaine, de celle qui viennent vous serrer le cœur un instant avant un long soupire. Tenant son volant entre ses deux mains à respectivement 11h45 et 12h15, il laissa son front reposer d’un coup sur ses pouces et se mit à marmonner dans sa barbe inexistante.
« J’espère que j’ai bien fermé la porte du bureau… »
C’était certainement ce qu’aurait entendu quelqu’un étant capable déchiffrer l’amoncellement de mots fatigués qui sortaient de sa bouche. En relevant la tête, sa paire de lunettes glissa de son visage venant chuter sur ses genoux. Un nouveau soupire sa main droite passa dans ses cheveux tandis que la gauche tentait péniblement de remettre ses lunettes en place. Impossible de faire quoi que ce soit sans cet outil symbole de l’avancée médicale de l’humanité car il était myope comme une taupe.
Se décidant enfant à sortir de sa voiture, le père Nam prit la sacoche limée qui lui servait de porte document, de sac à main, de rangement pour sa boite de repas et de trousse très certainement aussi… puis claqua la porte de son monospace avant de fermer le véhicule en un tour de clef et de se diriger vers la porte en ferraille signalant l’entrée de son petit paradis.
La maison des Nam-Kim n’avait rien d’exubérante mais elle était suffisamment confortable pour que les cinq membres de la famille y vivent sans avoir trop à se marcher sur les pieds. En poussant la porte, Hyunwoo eu le reflexe d’humer l’odeur du lieu, l’odeur confortable de sa maison, avant de laisser un sourire poindre sur ses lèvres en y reconnaissant aussi la note légère du parfum de Seonghee dans l’air tandis qu’il retirait ses chaussures.
« Chérie ! Tu es déjà rentrée ? » demandât-il à la volée. Evidemment, ce n’était pas une question, plutôt une affirmation amusée de savoir que pour une fois sa compagne ne finissait pas à des heures indus son travail.
Avançant dans le salon avec ses petits chaussons portant ses initiales – un cadeau d’anniversaire d’un de ses grands garçons – Hyunwoo balança son sac sur une chaise et parti à la recherche de sa compagne, le visage en avant comme s’il était capable de la retrouvée par le menton.
« Seonghee ? » appelât-il avec tendresse alors qu’il ne recevait pas encore de réponses, une légère inquiétude pointant dans sa voix à la simple idée que sa femme ne lui réponde pas car elle aurait été trop prise par une envie soudaine de faire de la pâtisserie.

Comment ne pas avoir une vision trouble alors que mes yeux parcourent les lignes de ce dossier depuis des heures ? On me demandait des conseils pour une nouvelle entreprise mais mon niveau de ma fatigue accumulé avec mon stress donnaient un cocktail détonnant… il me restait une seule option : refermer ce dossier avant de récupérer mon sac pour prendre la tangente. Pourquoi mes fesses sont-elles encore collées sur mon fauteuil ? Est-ce que l’on peut nommer ça « conscience professionnelle » ? Possible mais mon estomac gronda alors je fourre mon dossier dans ma sacoche puis repousse mon siège pour saluer ensuite mes collègues. L’appel de mon estomac sera toujours important que ma conscience professionnelle. Bizarre ? Vous ne m’avez jamais vue me transformer en monstre affamé. Un spectacle peu glorieux !!

Quand je me gare devant notre maison, mon estomac pousse des plaintes tonitruantes. Il est temps de le combler en avalant quelque chose. Tiens ! Pourquoi je ne ferai pas des cupcakes ? J’avais vu une recette simple. Mes garçons seront heureux que leur maman pâtisse. Ils aimaient tellement mes gâteaux. Je claque ma portière puis me dirige vers ma porte en espérant que mon homme sera présent… bon pas de chance ! Hyunwoo n’est pas encore rentré !?! Mes épaules deviennent lourdes tandis que ma bouche dessine une moue boudeuse et déçue. Il me manque mon mari ! Oui ! On se voit tous les jours mais maintenant encore plus… Pourquoi suis-je ainsi ? Est-ce que je couve quelque chose ? Ne serait-il pas plus raisonnable de consulter un médecin ? J’en parlerai avec Hyunwoo. Il aura des conseils sages comme toujours.

Les placards ouverts… La farine renversée sur le plan de travail ainsi que sur le sol… Mes cheveux en avaient aussi dedans… des coquilles d’œufs jonchaient partout sur le plan… moi ? Je suis à genoux derrière le comptoir, pleurant comme une enfant ayant un gros chagrin. Est-ce que la voix de mon époux résonne dans la maison ? Je voudrais répondre mais mes pleurs sont incontrôlables. Mes larmes laissent des sillons sur ma joue. Il me faut du temps pour me mettre debout, et courir vers lui pour m’engouffrer dans ses bras. Est-ce que j’ai laissé mes cupcakes au four sans surveillance ? AH OUI !!! Je planque mon visage contre son torse, pleurant encore.

Hyunwoo eut à peine le temps de répéter le nom de sa douce compagne que déjà deux bras se précipitaient vers lui, venant l’enlacer dans des soubresauts de sanglots étouffants. Par reflexe, tandis que ses yeux s’élargissaient sous ses verres de lunettes, le Nam se mit à caresser doucement le dos de Seonghee, son autre main venant se poser à l’arrière de sa tête.
Un rapide regard sur la cuisine fit réaliser au père de famille que la pire situation possible avait bien eu lieu. C’était si rare que sa femme rentre plus tôt que lui qu’il n’avait pu que craindre cette issue. La mère de ses enfants s’était bien mise à pâtisser, certainement avec enthousiasme comme elle le faisait à son habitude, mais à la vue de l’état dans lequelle elle se trouvait, il en venait à douter de ce qui avait bien pu arriver.
Seonghee était la poésie incarnée, douce, drôle, lumineuse, un véritable arc-en-ciel à côté duquel sa bien pâle personnalité avait la chance de se trouver. Ils avaient eu des hauts et des bas, comme tous les couples après tout, mais ils avaient fini par trouver comment aller dans la même direction et se compléter, tel le ying et le yang s’ils croyaient à ce genre de choses. Mais les aspects ésotériques des rencontres faites par l’intervention du destin, et toutes ces chimères que l’on avait tenté de leur inculquer depuis leurs enfances à l’un et l’autre, cela faisait bien longtemps qu’ils les avaient mis de côté, oublié, passé sous le tapis.
Car, ils savaient eux, qu’ils avaient avant tout du se remonter les manches pour créer tous ce qu’ils avaient ici et maintenant, la stabilité de leur foyer, la douceur de l’amour pour leurs enfants, la tendresse qu’ils éprouvaient toujours l’un pour l’autre malgré toutes ces années.
« Chut ...Tout va bien je suis là. » lui intima Hyunwoo à l’oreille avant de la bercer doucement dans ses bras.
Après un instant, Hyunwoo s’écarta doucement de l’étreinte de sa compagne tout en gardant sa main dans son dos, libérant la tête de cette dernière, il vint passer son pouce sous ses joues pour en essuyer ce qui ressemblait aux traces de torrents de larmes.
« Qu’est-ce qu’il s’est passé ? » lui demandât-il sans jugement, cherchant à replacer les cheveux de la Kim afin de libérer son si beau visage malgré les émotions tortueuses qu’elle affichait en cet instant.

Une tempête est-elle passée dans la maison, plus particulièrement dans la cuisine ? Les manifestations météorologiques ne sont pas responsables de cet immense bordel qui rend cette pièce apocalyptique. On a seulement besoin de ma petite personne prise d’une folle envie de mettre les mains dans les pâtes pour préparer un gâteau. Tout mon entourage connait ma relation amour/ennemie avec la pâtisserie. Gourmande. En tant que bec sucré incorrigible, je rêve de faire mes propres gâteaux mais il y a quelque chose qui ne fonctionne pas dans mon cerveau. Les recettes ? Je les suis, et le résultat n’est jamais identique aux photos. Le goût ? Euh… mes hommes mangent mais souvent ils affichent des expressions dignes des pires punitions que j’ai pu inventer pour mes garçons suite à leurs bêtises. Une parfaite candidate pour « Nailed it ». Les jurys n’auraient plus aucun souci de digestion avec moi, ils iraient en courant aux toilettes.

Comprenant que mes compétences de pâtissière avaient encore été une catastrophe, les larmes me brûlent les yeux, brouillant ma vue. Pourquoi ? Les échecs sont monnaie courante pour moi dans ce domaine, et jamais je me suis mise à pleurer de cette façon. Je ne comprenais pas les raisons de ses petites gouttes qui inondent mon visage. Je ressens un poids sur mes épaules, un abattement certain. Il en ressort quoi de bon ? Les choses n’avancent pas. Mes cupcakes sont dans le four sans aucune surveillance alors que je fonce dans les bras rassurants de mon époux qui vient de rentrer.

Je passe mes bras autour de sa taille, cachant mon visage contre son torse, fermant fort les yeux tandis que mes larmes mouillent sa chemise. Hyunwoo me réceptionne sans prononcer un seul mot, il accepte seulement que sa femme un peu folle débarque ainsi. Nous sommes deux âmes destinées l’une à l’autre… comme tous les couples nous avons eu des moments compliqués mais jamais cela a entamé les sentiments que nous avions. On a appris à se serrer les coudes devant les obstacles. Il est le meilleur morceau de nous, toujours tendre, la tête froide et tellement proche de nos fils. Il n’a jamais perdu ce qu’il était en devenant papa, pourtant nos terreurs lui en ont fait voir de toutes les couleurs. Les autres me déçoivent toujours mais jamais Hyunwoo. La force tranquille dans notre binôme.

Lorsque mes larmes se calment, il me décolle de son torse puis essuie les dégâts de ses doigts. Son geste me fait fondre. Je secoue la tête pour confirmer que sa présence me réconforte. Levant les yeux vers lui, mon cœur explose en un millier de petites bulles. Il est parfait ! Je lui présente une moue boudeuse un peu tremblante. « J’ai fait des cupcakes. » La dernière fois ? Je venais d’apprendre que Chaehwa grandissait dans mon ventre. La sonnette du système du détecteur de fumée retentit derrière nous. « Oups ! On ne pourra pas les manger. » Je me détourne de mon mari pour aller éteindre le four et sortir ma fournée catastrophique. Je pleure à nouveau. « Je suis nulle… »

Seonghee avait pâtisser. Si à bien des égards il y avait là quelque chose qui pourrait sembler anodin à toutes personne extérieure à la famille Nam-Kim, était certain que pour les habitants de cette maison, un acte tel que celui-ci représentait soi une envie de la mère de famille de se défouler pour une raison ou une autre ou bien… un énorme craquage. Pour autant, l’état de la jeune femme était rarement aussi explosif. Bien qu’elle ne soit pas la reine du rouleau et de la crème anglaise et malgré ses nombreux échecs aux fourneaux, il était rare de la voir ainsi fondre en larme et Hyunwoo n’arrivait en l’instant pas à se remémorer la dernière fois qu’il l’avait vu ainsi à la suite d’un raté culinaire.
Acquiesçant à la réponse timide sur le visage adorablement mouillé de sa compagne, le fil de pensée du père Nam se fit interrompre par le bruit du détecteur de fumé et par réflexe il leva la tête vers le plafond en pinçant les lèvres. Heureusement, la sorti du four des petites pâtes carbonisées et la fermeture de ce dernier permirent à l’alarme de s’éteindre. Avec un peu de chance les voisins n’avaient rien entendus et n’allaient pas débarquer avec des sceaux d’eaux. A Ulleng on ne savait jamais à quoi s’attendre concernant la bienveillance des uns et des autres, parfois bien mal venu.
Les larmes se mirent à couler à nouveau sur le visage de sa bien aimé et Hyunwoo se précipita vers elle à nouveau avec une toute nouvelle réaction cette fois-ci. Le mode « époux attentionné » ne suffisait pas, il fallait qu’il passe en mode « papa poule » avec sa femme. Retirant les maniques des mains de Seonghee en lui murmurant doucement « allez hop d’une et de deux » il prit ensuite la main de sa femme en pleure et la tira à sa suite vers le salon avant de l’asseoir sur le canapé.
Là, il lui restait deux choses à faire, commander à se faire livrer à manger pour la soirée, car il était hors de question que le Nam s’occupe plus de la cuisine que de sa femme et qu’une horde de trois loustiques affamés risquaient de débarquer à tout moment, et surtout, il devait parler et cajoler celle qui avait le plus besoin de soutien en l’instant présent.
Cherchant son téléphone dans la poche de son pantalon, Hyunwoo envoya un message à son ainé pour lui dire de rentrer avec trois pizza peppéronis dont une supplément fromage et une pizza magarita avec supplément champignons ; puis s’installa à côté de Seonghee en lui caressant les cheveux avant de lui déposer un baiser sur la tempe.
« Kim Seonghee, vous me cachez quelque chose… » dit-il en la berçant doucement dans ses bras, son esprit naturellement inquiet cherchant toutes les probabilités qui pouvaient avoir amené sa femme à devenir ainsi une fontaine d’émotion. Cela devait bien faire plus de quinze ans qu’il ne l’avait pas vu comme ça… oui au moins !
« Je crois que la dernière fois que je t’ai vu pleurer comme ça en cuisine Chaehwa n’était pas encore né… » ajoutât-il avec un petit rire en laissant son bout du nez caresser le cuir chevelu épais de sa compagne dont il aimait tant l’odeur, habitué à son parfum et son shampoing qui étaient pour lui une senteur si réconfortante.

Connaissez-vous plus grande frustration que celle de ne pas contrôler ses crises de larmes ? Une vraie calamité ! Je ressens un poids qui étreint mon cœur pendant que les bras rassurants de mon époux m’enveloppent dans un cocon me coupant du monde. Son odeur remplit mes narines, ce parfum masculin qui avait toujours eu le don de faire palpiter mon cœur. Sa douceur apaisait ma crise de larmes, me rendant un peu ma respiration mais surtout le contrôle de ma respiration. Hyunwoo n’a pas le temps de me prodiguer des paroles encourageantes que le détecteur de fumée nous interrompt. Abandonnant ma protection, je sors les petits gâteaux du four pour stopper les bips stridents. Les larmes coulent à nouveau sans aucune raison. Je me sens totalement démunie. Que m’arrive-t-il ? Les crises de larmes incontrôlables remontaient au temps où Chaehwa était encore un fœtus.

Hyunwoo prit soin de moi comme une enfant aurait besoin de ses parents pour être consolée. Je ne suis pas fan de cette sensation mais cela me fait du bien d’être dorlotée. Il me parle doucement, et je me laisse faire quand il retire les maniques pour moi. Il me prend la main pour m’emmener vers le canapé avec mon visage inondé. On dirait une folle ! Il va prendre peur ! Il ne peut plus me quitter après toutes ces années passées ensemble ? Il est mon roc.

Je pose mes fesses dans notre canapé, observant ma moitié utiliser son téléphone pour une raison inconnue. Il ne me vient pas encore à l’esprit que le repas de ce soir doit être préparé, les garçons peuvent revenir d’un instant à l’autre. Je me laisse seulement dorloter par Hyunwoo, et ferme les yeux quand il embrasse ma tempe. Ses paroles me ramènent vers lui. Lui cacher quelque chose ? Oui il y a bien quelque chose que je ne peux pas me résoudre à formuler à haute voix. Cela est angoissant ! Il me berce, et ma respiration saccadée se calme. Je ferme les yeux, me reposant contre lui. Cela fait du bien de ne pas plus avoir besoin de faire la femme forte. Une pause.

Sa remarque attire mon attention. Je me redresse dans son étreinte, essuyant mes larmes du revers de la main avant de lâcher un hoquet. Je recule, ramène un genou sous moi puis me tourne en direction de Hyunwoo. Je prends deux grandes inspirations puis lui envoie « J’ai plusieurs jours de retard. » Je me mords nerveusement les lèvres en chassant encore mes larmes. Mes yeux cherchent ceux de mon compagnon. Je tends la main vers lui, attrape la sienne que je serre fort avant de poursuivre. « Mes émotions jouent au yoyo ces derniers temps. Je pleure, je suis en colère pour un rien. » Je le regarde paniquée. « Qu’allons-nous faire ? »

Il n’y a pas de remède magique aux crises d’angoisse. Hyunwoo en sait quelque chose, lui qui devait mener une vie bien rangée, simple, sans soucis apparents, voilà qu’il avait fini par devenir une véritable boule de stresse, toujours à penser aux autres, à se plier en quatre. Même si, dans les faits, ce n’était certainement pas une situation enviable, c’était aussi une vie qui lui convenait, car de savoir que sa famille pouvait ainsi toujours compter sur lui était le plus important au final. Le père Nam avait donc une certaine expérience pour apporter le calme dans la maison lorsqu’un des membres craquait. Si Seonghee était le rayon de soleil qui permettait à leurs fils de toujours voir des lendemains heureux, lui apportait l’assurance d’avoir toujours une épaule sur laquelle pleurer. Ces rôles, habituellement inversés dans les familles, venaient aussi de leur histoire commune. Seonghee avait beaucoup souffert au début de leur relation en raison d’une grosse prématurée et des choix qu’ils avaient faits. Ils ne regrettaient rien aujourd’hui, pas un seul instant passé ensemble, mais cela ne voulait pas dire que tout avait été toujours rose.
Ainsi, lorsque la crise de larmes sembla passer, que sa femme se redressa et le regarda avec un visage indéchiffrable avant de prononcer els quelques mots qu’il ne s’attendait pas à entendre, Hyunwoo eut la sensation de tomber de plusieurs étages. Son cœur se détachât dans sa poitrine pour tomber dans son estomac et il resta là, un instant d’infini solitude à regarder Seonghee sans véritablement comprendre ce qu’il se passait. Son cerveau essayant vainement de digérer l’information que l’on venait de lui donner.
La Kim enchaina ses paroles, venant avec quelques explications simples confirmer ce qui lui semblait pour le moment inconcevable. Il savait tout d’elle, tout faisait sens dans les symptômes qu’elle lui décrivait car il les avait déjà expérimentés… trois fois …
Le regard paniqué de Seonghee ramena Hyunwoo sur terre et comme par reflexe, car c’était ce qu’il avait fait, les trois fois précédentes, il embrassa Seonghee. Un long baisé, une maque d’affection n’ayant aucune commune mesure venant la rassurer, lui rappeler qu’il serait là quoi qu’il arrive, car c’était le cas depuis le premier jour. Depuis leur premier rendez-vous, où il avait eu le courage de lui prendre la main après qu’elle ait rit à l’une de ses blagues qui devait certainement être piteuse. Lui et ses cheveux mi-long, qui savait à peine faire trois accords à la guitare mais ne pouvait s’empêcher de vouloir jouer aux évènements de l’université. Lui et ses montures de lunettes en aviateur, à l’époque, ses chemises à carreau et ses jeans trop serrés, il avait réussi à la séduire elle, Seonghee. Parfois la vie vous gâte. Alors il restait à ses côtés quoi qu’il en coute, car il l’aimait depuis le premier jour.
Se détachant d’elle, le père Nam continua d’afficher un visage perdu, l’angoisse de sa femme semblait avoir infusé en lui avec ce baiser. Lâchant les mains de Seonghee un instant il se leva, lentement, comme s’il essayait de ne pas tomber, fit le tour de la table basse et se planta là, face au canapé, passant la paume de sa main sur son front en se relevant la mèche, son autre main posée sur ses hanches dans une position pensive.
« Rendez-vous chez le gynéco ? » balbutiât-il comme une question lancée à travers la pièce, seuls mots qu’il réussit à articuler.